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L'homme le plus heureux est celui qui fait le bonheur d'un plus grand nombre d'autres.
Miserando atque eligendo : en lui faisant miséricorde et en le choisissant.
Le jour de la fête de l’apôtre Matthieu est vraiment le bon jour pour méditer sur la devise du Pape François, tirée de la 21ème homélie de Bède le Vénérable que les religieux et les prêtres lisent aujourd’hui dans l’Office des Lectures.
Choisi parce que misérable, choisi pour devenir objet de miséricorde ? Bien davantage !
Aimé de miséricorde, afin de devenir un sujet actif, un sujet « miséricordié » et miséricordieux. Voilà l’itinéraire de Matthieu : alors que tant d’autres apôtres ont été choisis dans un vivier pieux, si ce n’est même dans la parenté de Jésus – ce qui ne les exonèrera pas de faire l’expérience de leur misère –, Matthieu comme Marie-Madeleine témoignent de la propension de Jésus à aller jusqu’aux extrêmes pour chercher les brebis perdues.
Ce n’est sans doute pas pour rien que la série américaine « The Chosen », qui fait en ce moment un tabac, propose au spectateur de s’identifier à Madeleine et à Matthieu, et suit leurs approches respectives du Messie. Le récit que l’évangéliste lui-même a donné de sa conversion nous permet ainsi de comprendre le sens exact de l’insistance du pape François à affirmer que tous ont leur place dans l’Église.
Pour ne donner que cet exemple récent, la conversation du pape jésuite avec ses confrères à Lisbonne (5 août 2023) a donné lieu à une même interprétation excessive, qui permet aux détracteurs de le critiquer, et aux louangeurs de lui faire dire bien autre chose qu’il ne dit. La première affirmation du pape François est indiscutable, on ne peut la remettre en question qu’en reniant l’évangile : « Je crois qu’il n’y a pas de discussion sur l’appel adressé à « tous ». Jésus est très clair sur ce point : tout le monde… Tout le monde est donc invité. C’est là l’essentiel. Et l’attitude pastorale la plus appropriée doit être appliquée à chacun. Tout le monde, tout le monde, est appelé à vivre dans l’Église : ne l’oubliez jamais ».
La difficulté surgit lorsque certains catholiques semblent dire que, la morale évoluant, ce serait à l’Église d’abandonner ses exigences, et donc d’accepter de se « mondaniser », ce contre quoi le pape ne cesse de s’insurger.
Dans ce cas-là, Jésus se serait contenté de visiter Matthieu et de lui dire que l’esclavage de l’argent qu’il subissait à son comptoir de percepteur était une bonne chose. Non ! Il lui dit : « suis-moi ! » - Et il le suivit. Et Jésus qui sauve la vie de l’adultère ne minimise pas sa faute, mais lui dit bien : « Va et ne pèche plus ! » (Jn 8, 11).
Certes, l’attitude du pape François est une attitude pastorale largement bénéficiaire du discernement ignacien : « Nous ne devons pas être superficiels et naïfs, en forçant les gens à adopter des choses et des comportements pour lesquels ils ne sont pas encore mûrs, ou dont ils ne sont pas capables. L’accompagnement spirituel et pastoral demande beaucoup de sensibilité et de créativité ».
Cependant, il est clair qu’il s’agit d’un chemin, d’un cheminement avec Jésus, qui suppose des renoncements pour Matthieu comme pour chacun d’entre nous. En ce sens, relisons ces lignes de saint Paul que nous avons entendues récemment, le 1er septembre : La volonté de Dieu, c’est que vous viviez dans la sainteté, en vous abstenant de la débauche, et en veillant chacun à rester maître de son corps dans un esprit de sainteté et de respect, sans vous laisser entraîner par la convoitise comme font les païens qui ne connaissent pas Dieu (1 Th 4, 3-5).
La fête de l’apôtre Matthieu est l’occasion pour chacun de nous de reconnaître combien encore nous sommes assis dans le péché, combien suivre Jésus peut tout changer dans notre vie. Laissons encore la parole au pape François : « la rencontre entre la miséricorde et le péché… C’est si beau de rencontrer Jésus ! ».