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Le droit de râler n'est pas inscrit dans la déclaration des droits de l'Homme, c'est pourtant celui auquel nous sommes le plus attachés.
Chers frères et sœurs, la célébration de ce 5e dimanche du carême fait suite à l’élan de miséricorde impulsé par le dimanche précédent où nous voyions Jésus faire bon accueil aux publicains et aux pécheurs au point de manger avec eux. Il illustra même cette attitude par la parabole du Père miséricordieux dont nous avons été longuement instruits.
Cependant, ce comportement du Christ n’a de cesse de susciter chez les scribes et pharisiens du mépris, de la suspicion, voire un scandale. Ce Jésus ne se rend-il pas complice du péché avec une telle familiarité avec les pécheurs ? Voilà une question qui bouillonnait certainement au fond d’eux-mêmes si bien que dans l’Évangile de ce jour, leur esprit négativement fertile les poussa à le mettre à l’épreuve afin de pouvoir l’accuser.
En effet, les scribes et pharisiens présentent à Jésus une femme adultère en lui disant : Maître, cette femme a été surprise en flagrant délit d’adultère. Or, dans la Loi, Moïse nous a ordonné de lapider ces femmes-là. Et toi, que dis-tu ? (Jn 8, 4-5). Visiblement, ils veulent mettre le Christ dans une situation désobligeante dans la mesure où s’il acquiesce d’un côté, il est en porte à faux avec tout son discours miséricordieux et risque de perdre l’estime du peuple qui le tient pour un prophète. De l’autre côté, renoncer d’appliquer la sentence prévue apparaît comme une opposition publique à la loi qui le rend passible du tribunal.
Leur faux coup semble donc prendre Jésus au piège, mais se heurte à une déconvenue devant la sagesse dont il fait montre : Celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre (Jn 8, 7), dit-il.
La démarche du Christ a consisté d’une part à démasquer l’hypocrisie des scribes et pharisiens en leur faisant prendre conscience qu’ils sont tout autant pécheurs que cette femme, et d’autre part à attirer leur regard sur une justice plus grande qui n’est autre que celle de l’amour qui accomplit pleinement la loi. Ainsi, la loi est non seulement respectée mais la miséricorde et la bonté du Christ sont toujours de mise.
Cette vérité a désarmé les accusateurs qui s’en allèrent l’un à la suite de l’autre en commençant par les plus âgés, laissant finalement seuls la femme adultère et Jésus, la misère humaine et la miséricorde divine. Au cœur de ce face à face, le Christ réaffirmera son indulgence vis-à-vis d’elle mais son intransigeance vis-à-vis du péché : « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? » Elle répondit : « Personne, Seigneur ». Et Jésus lui dit : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, et désormais ne pèche plus ». Jésus ne prononce aucune condamnation ni aucun jugement à son endroit, mais ouvre pour elle l’horizon d’une vie nouvelle qui se détourne du péché. Sa miséricorde est une main tendue qui la relève de la misère de son péché avec lequel elle doit rompre désormais.
Chers frères et sœurs, cette situation qu’a vécue cette femme adultère nous rejoint dans notre vie de tous les jours. Nous sommes en effet tous des pécheurs qui avons besoin de la miséricorde de Dieu, Lui qui ne se fatigue jamais de nous pardonner. Son plus ardent désir est que nous soyons résolus à abandonner notre vie de péché pour une vie nouvelle, une vie de grâce dans la vérité et dans l’amour.
Cette conversion qui implique un changement de vie est une démarche nécessitant des renoncements de notre part. Il nous faut abandonner des choses qui nous coûtent et que nous tenons pour des avantages, mais qui en réalité sont bien peu de chose en comparaison avec les grâces divines. C’est l’expérience qu’a vécue saint Paul après sa rencontre avec le Christ. Il a fait table rase du passé pour n’avoir d'yeux que pour le Christ : Tous les avantages que j’avais autrefois, je les considère comme une perte à cause de ce bien qui dépasse tout : la connaissance du Christ Jésus, mon Seigneur (Ph 3, 8).
Si donc ce bien inestimable qu’est la connaissance du Christ a pu transformer radicalement la vie de saint Paul au point de ne plus regarder en arrière, mais de s’élancer vers le but en vue du prix auquel Dieu nous appelle là-haut dans le Christ Jésus, alors il peut en être de même pour nous. Nous n’avons qu’à ouvrir notre cœur à sa grâce et goûter aux délices de sa miséricorde. Le faisant, nous perdrons tout goût des biens terrestres auxquels nous sommes attachés, nous aurons la force nécessaire pour nous défaire du péché et nous lier à une vie sainte.
En clair, nous pourrons dire non au vice et oui à la vertu, laissant derrière nous notre passé ténébreux pour construire un avenir lumineux éclairé par la miséricorde du Christ. Laissons-nous saisir par Lui pour que les paroles de ce cantique soient effectives dans notre vie : saisis par le Christ Jésus, je cours droit, tout droit vers le but. Pour lui, j'ai tout sacrifié car pour moi il s’est livré.
Seigneur, tu ne nous condamnes pas et ne nous juges pas, mais tu nous accordes ta miséricorde. Apprends-nous comme toi à être intransigeants vis-à-vis du péché et indulgents à l’égard des pécheurs nos frères. Puissions-nous puiser la force du pardon dans la conscience de nous savoir pardonnés par Toi. Amen.