Homélie du pape François à Sainte-Marthe � Lundi 16 mars 2020

Homélie du pape François à Sainte-Marthe � Lundi 16 mars 2020

Nous continuons à prier pour les malades. Je pense aux familles, confinées, aux enfants qui ne vont pas à l'école et aux parents qui peut-être ne peuvent pas partir. Que le Seigneur les aide à découvrir de nouvelles façons de montrer notre amour, de vivre ensemble dans cette nouvelle situation. C'est une bonne occasion pour retrouver de l'affection authentique en étant créatifs dans la famille. Prions pour les familles, afin que les relations familiales donnent de beaux fruits.

 

Dans les deux textes que la liturgie nous fait méditer aujourd'hui, une attitude attire notre attention, une attitude humaine, mais qui n’est pas de bon esprit : la colère. Au début, les habitants de Nazareth écoutaient Jésus, ils aimaient sa façon de parler, et puis quelqu'un a dit : « Mais dans quelle université a-t-il étudié ? Il est le fils de Marie et Joseph, il est charpentier, que peut-il nous dire ? ». Ils étaient en colère : tous devinrent furieux. (Lc 4, 28). Et cette colère les conduit à la violence : Ils se levèrent, poussèrent Jésus hors de la ville, et le menèrent jusqu’à un escarpement de la colline où leur ville est construite, pour le précipiter en bas (cv. 29).

Il en va de même avec Naaman : c’était un homme bon, ouvert à la foi mais quand le prophète lui dit d’aller se baigner sept fois dans le Jourdain, il se met en colère : Je m’étais dit : Sûrement il va sortir, et se tenir debout pour invoquer le nom du Seigneur son Dieu ; puis il agitera sa main au-dessus de l’endroit malade et guérira ma lèpre. Est-ce que les fleuves de Damas, l’Abana et le Parpar, ne valent pas mieux que toutes les eaux d’Israël ? (2 Rois 5, 11-12). Et il se met en colère.

À Nazareth aussi il y avait de bonnes personnes ; mais qu'y a-t-il en eux pour les amener à une telle attitude de colère ? Pire encore : à la violence. Qu’il s’agisse du public de la synagogue de Nazareth ou de Naaman, tous pensaient que Dieu ne pouvait se manifester que dans l'extraordinaire, dans des choses hors du commun ; que Dieu ne pouvait pas agir dans les choses normales de la vie, dans la simplicité. Ils ont dédaigné la simplicité. Ils se mettent en colère, ils méprisent les choses simples. Or notre Dieu nous fait comprendre qu'Il agit toujours dans la simplicité : dans la simplicité de la maison de Nazareth, dans la simplicité du travail quotidien, dans la simplicité de la prière... Les choses simples. Alors que l'esprit du monde nous conduit à la vanité, aux apparences...

Et tous finissent par être violents : Naaman est très poli, mais il claque la porte au nez du prophète et s'en va. Un geste violent. Les gens de la synagogue, eux, commencent à se révolter, à s'échauffer, et ils prennent la décision de tuer Jésus : ils le font sortir pour le jeter de la falaise. La colère est une mauvaise tentation, qui conduit à la violence.

On m'a montré il y a quelques jours, sur un téléphone portable, une vidéo de la porte d'un immeuble qui était en quarantaine. Il y avait là une personne, un jeune homme, qui voulait sortir. Le gardien lui a dit qu'il ne pouvait pas, et le jeune homme a commencé à le frapper, avec colère, avec mépris. « Mais qui es-tu, toi "le noir", pour m'empêcher de sortir ? » La colère est l'attitude des orgueilleux, mais des orgueilleux... avec une pauvreté d'esprit qui est laide ; des orgueilleux qui ne vivent qu’en pensant être plus qu'ils ne sont. Les gens qui s'indignent sont dans un "ghetto" spirituel, car en fait, ils ont souvent besoin de se mettre en colère, de s'indigner, pour croire qu’ils sont quelqu’un.

Cela peut aussi nous arriver : les théologiens l'appellent "le scandale pharisaïque", qui consiste à être scandalisé par la simplicité de Dieu, par la simplicité des pauvres, par la simplicité des chrétiens, comme pour dire : « Cela ne vient pas de Dieu. Non, non. Notre Dieu est plus cultivé, plus sage, plus important. Dieu ne peut pas agir avec cette simplicité ».

Et la colère conduit toujours à la violence, qu'il s'agisse de la violence physique ou de la violence de la médisance, qui tue comme la violence physique.

Pensons à ces deux passages : la colère du peuple dans la synagogue de Nazareth et la colère de Naaman, qui n'ont pas compris la simplicité de notre Dieu.