saint Philippe Neri
Le moins que l’on puisse dire de Philippe Néri (1515-1595), c’est qu’il fut tout… sauf un triste saint : aujourd’hui il serait sans doute la coqueluche des plateaux TV ! Ce florentin de bonne naissance, ordonné prêtre à 36 ans, débordait d’enthousiasme et d’imagination. Il fit souffler sur la Rome du 16ème siècle, oppressante de sérieux et décadente, un grand vent d’espièglerie évangélique.
Proche des pauvres, en qui il voyait le Christ en personne, il développa pour eux plusieurs œuvres caritatives. Les pèlerins en visite dans la Ville Éternelle furent les premiers à en bénéficier. Inventif, il ouvrit aussi une maison de convalescence pour les malades. Novateur, il accueillit dans une institution spécialement créée pour eux les handicapés mentaux.
Mais c’est surtout vers les jeunes qu’il tourna son zèle apostolique en fondant l’ordre de l’Oratoire. Toujours joyeux, il mit sa gaîté naturelle au service de l’évangélisation de ceux dont la rue était la seule école. Avec le frère capucin Félix de Cantalice (1515-1587), qu’il croisait souvent dans les ruelles de Rome, il mit au point des scénettes pleines d’humour et truffées de références bibliques. Saint Félix, qui avait durant son noviciat fait le vœu de ne jamais manger un morceau de pain frais, fut durant quarante ans quêteur d’un couvent romain, visitant chaque jour des dizaines de…boulangeries ! Son lourd sac, chargé des miches qu’il distribuait en chemin aux indigents, était souvent au centre des joutes oratoires des deux religieux. Le cercle des curieux débordait des placettes où ils s’installaient pour débattre, provoquant des embarras de la circulation. Qu’un important ecclésiastique, proche du Pape, tente de forcer le passage ou de s’échapper incognito dans la foule et il devenait la cible des plaisanteries, voire de la correction fraternelle, des deux compères.
Philippe aimait faire rire, mais à la différence de nos comiques contemporains, il ne fut jamais un railleur : humour ne rime-t-il pas avec amour ? Inventif, prodigue en charité, jovial, Philippe fut un modèle d’actif-contemplatif. Car, comme nous le rappelle la première lecture d’aujourd’hui (Philipiens 4, 4-9), la joie chrétienne enracinée dans la prière de louange va de pair avec la pratique de l’Évangile. C’est ainsi que se vérifie l’adage : Ce que dit la bouche, c’est ce qui déborde du cœur (Luc 6, 45) : et le cœur de Philippe débordait d’amour.